Archive pour la catégorie ‘traditions réunionnaises’

Cannes de combat et croche, cause commune

Pendant deux jours, cannes en bois et prises au sol se sont entremêlées à l’occasion des tournois de l’Océan Indien de canne de combat et de croche, toutes deux disciplines de démonstration aux Jeux des Îles. Deux jours de combats et d’assauts disputés, ont permis aux combattants de ces deux disciplines, l’une endémique, l’autre indigène de La Réunion, de se découvrir et se redécouvrir. L’organisation conjointe de ces deux tournois par la Ligue de Croche et le Comité Régional de Canne de Combat et Bâton a offert au public, un beau spectacle lors des qualifications puis lors des finales organisées au Complexe Sportif Municipal du Port.

Sur le plan sportif, la compétition féminine de canne de combat a permis à Charlotte Payet de montrer qu’il fallait toujours compter sur elle malgré son départ en métropole pour ses études. Chez les hommes, Keren Descorsier, junior, a parfaitement maîtrisé son assaut face à David Leblé, vice-champion du monde 2012. Un vrai exploit et la confirmation des espoirs placés en Keren. Par équipe, la Réunion A l’a emporté devant l’équipe de Réunion B et l’équipe des Kréopolitains.

En croche, un homme a marqué la compétition : Wilfrid Sellaye, vainqueur chez les 71kg. Après la médaille de bronze en 1998 et celle d’argent en 2007 (en lutte olympique), il s’adjuge la médaille d’or cette année 2015 (en lutte traditionnelle) signant au passage la victoire le plus rapide du tournoi (en 33 secondes) et la plus grande domination technique (10-0 en 3′56 »).

Un seul regret pour les organisateurs : l’absence de la quasi totalité des tireurs invités de la grande ile et des Comores, bloqués à l’aéroport de Tananarive suite à l’annulation de leur vol

JIR du 14/08/2015

un cadeau original pour NOEL : une clé USB sur la culture réunionnaise

Patrice LOUAISEL est psychosociologue et guide culturel conférencier sur l’ile de la Réunion. Durant ses 15 dernières années d’activité sur l’ile, il a effectué de nombreuses sorties culturelles sur l’histoire, les religions et les traditions de cette belle ile et les a mises sur clé USB 4 GB sous forme d’un diaporama Powerpoint commenté …

Voici dont les thèmes abordés par les 7 sorties culturelles
qu’il a accompagnées :

1) « La Réunion des Religions » : Hindouisme, Islam et philosophies chinoises comparées au Christianisme

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2)  » Comprendre le symbolisme de la marche sur le feu »

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3)  » Comprendre le symbolisme de la cérémonie hindoue du Cavadi »

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4)  » Culte de Guan Di et philosophies chinoises : Confucianisme, Taoisme et Bouddhisme

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5)  » La Réunion Mystérieuse » : Esclavage, Marronnage, Croyances populaires et Sorcellerie

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6)  » La piraterie à Bourbon »

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7)  » Moringue et bataille Coqs : 2 traditions réunionnaises »

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Cette clé USB peut être commandée au tarif exceptionnel de 30€ jusqu’au 31/12/2011 (38€ à partir de 2012) en adressant un chèque à patrice LOUAISEL 1066 Chemin du Centre 97 440 ST ANDRE (Ile de la Réunion). Elle vous sera envoyée par voie postale en recommandé.

Shiva

nos traditions réunionnaises-comme notre histoire-en pleine déconfiture

Notre folklore réunionnais-tout comme notre histoire-souffrent des affres de l’oubli
par manque d’implication et d’engagement financier de nos responsables politiques et culturels : Au plan historique, tous nos monuments sont à l’abandon : « La Grand Cour » de St Paul de Mme Desbassayns, Domaine de Maison Rouge, Eglise St Thomas des Indiens, Cimetière des Malbars de St Louis etc…la liste est longue.

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la pratique du moringue : en chute libre ?

Qui ne connait pas ce sport de combat, cette danse, cette expression corporelle que René DREINAZA s’était évertué à faire renaître dès 1989 ?
Aujourd’hui avec 17 clubs et 281 licenciés, sa pratique semble en chute libre alors qu’en l’an 2000, on comptait 21 clubs et surtout 650 compétiteurs…

Alors qu’on croyait le moringue s’inscrire durablement en tant que redécouverte de cette tradition afro-malgache et de l’identité cafre, sa pratique semble s’essouffler à la Réunion. Alors désir de modernité, métissage, perte identitaire, oubli du passé et de ses traditions ? il est dommage que tout un pan de notre population oublie ce qui l’a soudée.

Rappelons que cette pratique clandestine durant l’esclavage, a été pratiquée durant l’engagisme non seulement par les noirs mais aussi par les « petits blancs » et les créoles de 1848 à la départementalisation de 1946, avant d’être effacée et de renaître en 1989 sous l’impulsion de Jean René DREINAZA

Aujourd’hui la relève n’est donc plus assurée et sa pratique s’essouffle même si on peut encore voir quelques
jeunes très motivés aux 4 coins de l’île. Alors, manque de nouveaux leaders ? insuffisance de subventions apportées
par nos assemblées et nos maires notamment lors de la « fête cafre » du 20 Décembre ? Absence d’une « fédération de Moringue » qui risquerait de « décréoliser ces rituels » selon certains ?

Comme les Hindous peuvent bénéficier lors de leurs fêtes
(Dipavali, Nouvel An tamoul) de subventions, il serait tout à fait normal que nos élus « mettent la main à la poche »
pour soutenir cet art ancestral qui représente toute une part de notre identité afro-malgache.

PL

à la découverte du MORINGUE

La « batay coqs » : loisir ou barbarie ?

 

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Une proposition de loi émise le 9/06/2010 par 2 députées métropolitaines, Geneviève GAILLARD (PS) et Muriel MARLAND- MILITELLO voudrait interdire la pratique traditionnelle des « batay-coqs » et des corridas en France. Une tradition très vivace à la Réunion…

Les textes et position des députées /C’est ainsi que cette tradition domienne, pratiquée aussi dans le nord de la France pourrait se voir interdite prochainement ne serait plus une exception tolérée par l’article 521-1 du code pénal réprimant les sévices aux animaux.

Ainsi, confirme Mme Gaillard au JIR,  » la tradition ne pourrait plus être invoquée comme un fait justificatif permettant de défendre un spectacle cruel où des gens s’amusent autour de la souffrance animale. » Pour elle, il y a « exacerbation de la violence animale »…

Sa consoeur a déclaré à l’ AFP qu’il s’agissait « d’un combat humaniste »
 » Nous voulons montrer qu’il y a des moments où il est possible de dépasser les clivages politiques pour défendre une noble cause »

5 gallodromes réunionnais sont ici reconnus. Les autres sont tolérés comme une tradition mais il est interdit d’en ouvrir de nouveaux.

une tradition fédératrice
Ils sont en effet nombreux à se retrouver tous les week-ends autant dans les villes que dans les hauts de l’île autour de cette passion, de tout âge et de toute origine ethnique confondus.

L’avis des « pour » :
Pour eux, il ne peut s’agir d’une coutume barbare puisque, si on les observe, les coqs sont naturellement belliqueux, ne supportant pas la présence d’un quelconque congénère tant est surdimensionnée leur notion de pouvoir et de territoire, qu’ils vont défendre envers et contre tout.

Durant leur croissance, ces animaux vont être bien élevés, nourris et soignés, parfois même cajôlés par celui qui les élève. D’ailleurs la plupart des combats ne sont en fait que des « entraînements » où au bout de 2 H maximum, l’arbitre tranche sur le vainqueur. Il suffit qu’un des coqs recule ou sorte du « rond » pour être considéré comme perdant. Il n’ y a que dans les grandes compétitions où l’issue du combat puisse se solder par la mort d’un des combattants et elles sont très rares.

Le respect du propriétaire à l’égard de son « coq batay » est réel : on ne coupera jamais un coq batay qui a été un vainqueur. D’abord, car il servira à la reproduction. Ensuite, par respect à son égard. C’est ainsi qu’il rejoindra le plus souvent les poules au poulaillier.

Pour eux, le problème est ailleurs : en effet, c’est bien parce qu’il y a des paris clandestins-et donc des subsides qui échappent au fisc- lors de ces batay que l’Etat veut les interdire. Toutefois, comme ces lieux sont privés, qui pourrait interdire aux « aficionados » de se réunir entre eux à huis clos pour partager cette passion ?

Avec 50% de la population en dessous du seuil de pauvreté, et un taux de érémistes équivalent à 4 départements français n’est ce pas un moyen pour certains de « faire bouillir la marmite » ?

Et dans ce cas, pourquoi ne pas interdire la chasse, la pêche voire les abattoirs -et l’engraissement forcé des animaux- qui représentent effectivement des violences à la gent animale ?

Certes la plupart des religions -au moins au niveau des prophètes et autres sages- prêchent la « non-violence » et de ne pas tuer. Dans ce cas,
devenons tous végétariens et il n’ y aura plus de problème de famine dans ce monde…

PL

NDLR Que vous soyez pour ou contre les « combats de coqs », ne manquez pas de réagir à la suite de cet article, avec tout le respect indispensable à un débat dépassionné.

Le MALOYA entre sauvegarde et transmission

A propos des sacrifices d’animaux…

J’ai lu avec intérêt le courrier des lecteurs de Mr RANGAPIN concernant « religion tamoule et lobby caprin » qui ouvre le débat contradictoire sur cette interessante question : doit-on ou non faire des sacrifices d’animaux en offrande au divin ? Les textes sacrés
nous parlent en effet de « l’agneau pascal », du « sacrifice du mouton » et des sacrifices de coqs et cabris chez les hindous. Mais, si l’on reprend le sens profond, il s’agissait d’un symbole utilisé par DIEU-mais seulement d’un symbole- afin d’interrompre les sacrifices humains que l’on faisait à l’époque il y a quelques milliers d’années pour honorer les dieux.

Dans notre religion, l’Hindouisme, comme dans les autres d’ailleurs,, et les textes religieux l’attestent avec force, on prescrit ahimsa : la non-violence. Par conséquent, on ne doit pas tuer et le but de tout adepte est donc de devenir végétalien et profondément respectueux de tout ce qui vit et qui est la création divine. Certes, celà ne peut se faire en un jour, mais c’est un mode essentiel de purification du corps et par conséquent de l’esprit. On doit donc progressivement réduire puis supprimer viande et poisson …N’est ce pas d’ailleurs ce que font implicitement les pénitents qui marchent dans le feu ou participent au CAVADEE, en procédant à un carème total de 21 jours (ou de 10 pour le Cavadee ou ils ne consomment que riz, grains, gateaux etc… ) ? Sans purification du corps il ne peut en effet pas y avoir purification du mental…
et à voir les comportements manifestés dans bon nombre de temples de villes où il y a des disputes perpétuelles et des anathèmes dignes des meilleurs fondamentalistes à l’égard des non-hindous..on ne peut qu’en être convaincu. (à moins comme le dit Mr RANGAPIN qu’il ne s’agisse que d’affaires de pouvoir ou de gros sous ?)

Certes la « promesse » faite à DIEU doit être respectée, mais les pratiquants sincères qui ont tout naturellement l’objectif de se purifier, ne pourraient ils pas faire-comme ils le font pour la déesse MARIAMEN, des offrandes purement végétariennes ? faire des rituels est essentiel, tuer ne l’est pas, approfondir sa foi par les 4 yogas et la vivre au quotidien dans ses relations avec les autres : voilà l’essentiel de ce que les maîtres nous ont appris.

Un pratiquant de l’hindouisme

Le MALOYA : entre sauvegarde et transmission

Lorsqu’on entend le mot « Maloya » pour la première fois, il sonne déjà comme une musique. Cette musique métissée dès son origine, issue des complaintes des esclaves n’est pas seulement une suite de sons spécifiques de la Réunion, c’est aussi la représentation de l’identité réunionnaise.

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Maloya au clair de lune -SVT- Peinture à l’huile

 Les esclaves amenés dans la colonie pour la culture de la canne à sucre et pour travailler dans les moulins à sucre, venaient de la côte Sud-Est de l’Afrique et de Madagascar. L’arrivée massive de ces hommes et de ces femmes d’origines différentes sur ce petit caillou de l’Océan Indien, a provoqué un brassage de cultures qui a amené en plus du métissage, l’apparition de musiques nouvelles, le Séga et le Maloya.

Pendant la période de l’esclavage qui a duré plus de 150 ans, le Tchéga se joue dans les Habitations entre les esclaves Mozambicains, Yanbanes, Zanbèz et Malgaches. Cette musique à 3 temps est essentiellement basée sur des percussions de trois instruments traditionnels : roulèr (houlèr), bobre et kayam (kayamb). Le roulèr est formé par un tonneau sur lequel est tendue une peau de bœuf, le percussionniste s’assied à cheval sur le tonneau et frappe des deux mains. Le bobre (bob) ressemble au berimbaù brésilien, arc à un fil sur lequel le musicien frappe avec un bâton en métal : le sati, ou en bambou : le pikèr. Le Kayam est fabriqué en mâts de chocas, en hampes de fleurs de cannes remplies de graines de cana.

Au fil de son évolution sont venus s’y ajouter le triangle et aujourd’hui le djumbé. Dans les propriétés, il arrivait aux esclaves lors d’évènements importants de faire un service Kabaré (d’origine Malgache). Ces services étaient voués aux ancêtres ou à la récolte. C’étaient des complaintes chantées par un choriste et repris par un chœur dans lesquels paraissent des mots de leurs anciens dialectes. Ils chantaient et pleuraient leurs peines et leurs maux, en se languissants ou en accélérant le rythme.

Cette musique est en plus des mots malgaches et africains, accompagnée d’onomatopées destinées à appeler les esprits. Musique de transe et de possession se joue au départ lors de services, en hommage aux ancètres. Cette musique est aussi le moyen de se moquer des maîtres quelques paroles sont en Français. Les colons craignent ces services kabaré jusqu’à les proscrirent dans leurs propriétés. Ces chants, danses et complaintes se pratiquent en cachette des maîtres après le labeur, le plus souvent le soir dans les camps ou à l’extérieur des cours d’usine. Ces chants et danses marquent aussi la fin des campagnes sucrières.

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Joueur de kayamb et de bobre- Acrylique SVT

Le Maloya « la danse des Noirs » est longtemps décrié par la population fortunée de la colonie qui ne jure que par le quadrille, la polka, la valse et d’autres danses européennes. Au début du XXe siècle, alors que le tchéga devient Maloya, le séga gagne les salons de la bourgeoisie locale. Des compositeurs comme Georges Fourcades, Jules Fossy ou encore Jules Arlanda, créent des chansons au son des instruments européens comme la guitare ou le violon en y ajoutant quelques rythmes locaux sans y inclure les percussions. Ils créent ainsi un folklore réunionnais copié par ses refrains et ses couplets sur les chansons européennes. D’après Stéphane Grondin, le « maloya est surtout lié au culte des ancêtres. » c’est le « Maloya lespri. » on distingue plusieurs autres sortes de maloyas. Le Maloya kabaré est « composé d’un pléré et d’un kasaz en maloya (question réponse); le Maloya valsé reprises de vieilles chansons françaises ; le séga Maloya « semble être l’ancêtre du maloya moderne ».

Dans les habitations, les esclaves ont laissé place aux engagés à majorité indienne, qui ne sont pas mieux lotis et considérés que leurs prédécesseurs dans les calbanons et dans les champs de cannes à sucre. Ils chantent en marmonnant quelques paroles que d’autres reprennent en chœur. Alors que les revendications sont réprimées sévèrement, les engagés épousent celles des « Caf » et les rejoignent dans leurs chants qui deviennent gémissements et plaintes se rapportant à leurs situations d’exploités. Cette tradition orale est ainsi perpétuée. Selon Gaston Hoareau , le terme « Maloya » a plusieurs significations suivant les dialectes de la zone. Au Mozambique Maloya signifie : sorcellerie ; au Zimbabwe : Grand sorcier ; à Madagascar Maloy aho : Parler ; et en Bambara, maloya veut dire : honte.

En 1946, La Réunion n’est plus colonie mais département français. Pour Stéphane Grondin : « Le maloya est prohibé par l’administration en place car le parti communiste avait repris les rythmes du maloya pour porter le message de la révolte contre l’ordre établi par la plantocracie au pouvoir depuis toujours. »
Il n’en sera pas moins joué dans les cours de particuliers descendants d’esclaves ou d’engagés. A chaque réunion politique du parti, le Maloya sera interprété. Cette musique porte en elle le poids de l’histoire de toute une partie de la population réunionnaise que ne se reconnait pas dans les canons véhiculés par le pouvoir colonisateur et esclavagiste, ce peuple uniquement blanc.

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Maloya -SVT -Huile Les années 1960-1970, le séga passe à la radio, est chanté et dansé dans toutes les fêtes alors que le maloya ne passe pas à l’antenne mais continue à vivre véhiculé par les chanteurs comme Gramoune Baba, Gramoune Lélé, La Rwa Kaf et des familles entières dévoués à cette musique devenue mouvement de revendication et de reconnaissance de leur histoire occultée. Au départ musique cultuelle et rituelle, puis contestataire, le Maloya se positionne aujourd’hui comme LA musique traditionnelle de l’unité réunionnaise. De nombreux acteurs dont Daniel Waro, Firmin Viry, Alain Peters, le groupe Ziskakan, entre autres ont participé à sa préservation et à son expansion depuis la fin du XXe siècle.

L’arrivée au pouvoir des Socialistes et du Président Mittérand en 1981, entrainent pour la première fois la fête du 20 décembre 1982 comme date anniversaire de l’abolition de l’esclavage à La Réunion. Cet évènement a donné au Maloya une reconnaissance officielle et la possibilité de paraitre enfin au grand jour.

Le 1er octobre 2009, le Maloya est classé au patrimoine mondial de l’UNESCO suite à un dossier présenté par la Maison des Civilisations et de l’Unité Réunionnaise, le Pôle régional des musiques actuelles et plusieurs artistes.

Sources :

- Monique Desroches et Guillaume Samson – ethnomusicologues – ouvrage collectif « Anthropologies de la Réunion » paru fin 2008 Sous la direction de Christian Ghasarian. Ont aussi participé à cet ouvrage : Hélène Paillat Jarousseau, Patrice Pongérard, Jean-Pierre Cambefort, David Picard, Laurence Pourchez, Philippe Vitale, Michel Watin, Barbara Waldis, Richard Lee Tin, Stéphane Nicaise, Laurence Tibère, Monique Desroches, Guillaume Samson, Françoise Vergès. – Benjamin LAGARDE. Doctorant en anthropologie à L’Université de Provence – France, il a publié en collaboration avec G. Samson et C. Marimoutou « L’univers du maloya. Histoire, ethnographie, littérature en 2008″ (Océan éditions, La Réunion) – Stéphane Grondin –président du maloyallstars – - Gaston HOAREAU « Explication succincte du maloya », (extraite de « Bourbon Maloya », triple CD Audio, Association les Chokas). Anon vwar an liyn : Blog d’André Robèr

article issu de zinfos974.com, écrit par Sabine Thirel et publié avec son aimable autorisation

Le MORINGUE :art martial, danse guerrière ou pratique cultuelle ?

Art martial, pratique cultuelle ou encore danse guerrière, le Moringue fait-il partie du patrimoine réunionnais ?
Quoi qu’il en soit le Moringue remonte au peuplement de La Réunion. En effet, au début du XVIIIe siècle les hommes et femmes, main d’œuvre pour le café puis pour le sucre de canne, sont emmenés des pays d’Afrique orientale et de Madagascar. Ces esclaves Cafres sont arrivés avec leurs cultures et leurs musiques.
Venant au départ de contrées lointaines les unes des autres, ils étaient en plus séparés dès leurs débarquements. Par la suite, la vente et la répartition des esclaves les isolaient encore dans des plantations éloignées. Ces hommes d’origines différentes ne se connaissaient pas. Ils ne pouvaient pratiquer leurs coutumes. De plus, le travail des champs et des moulins à sucre leur laissait que peu de temps libre, pour danser et jouer de la musique.
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Cependant, les esclaves ont trouvé le moyen de s’extérioriser. Un arc musical muni d’une calebasse sert de caisse de résonance. Un fil tendu sur lequel tape le piqueur rythme les chants. Cet arc est un instrument de musique traditionnel originaire du Mozambique et de l’Angola.
Les colons peu nombreux et propriétaires d’un grand nombre d’esclaves craignaient à tout moment une révolte. Si cela arrivait, ils seraient vite débordés et abattus comme cela se passait déjà dans les colonies des Caraïbes. Il était important de garder le contrôle par n’importe quel moyen. Les esclaves devaient respecter un certain nombre de règles : Interdiction de réunion, interdiction de se battre, interdiction de dépasser les limites de l’habitation, interdiction de rencontrer les esclaves des autres propriétés…

Concentrés dans une plantation, les esclaves devaient gérer les problèmes relationnels d’une cohabitation difficile due à une surpopulation tout d’abord. Ensuite, leurs cultures différentes freinaient les échanges. Les femmes trop rares provoquaient aussi des jalousies et étaient causes de rivalités. Les conflits devaient se régler hors du temps dévolu au travail. Alors, pour les règlements de comptes, les hommes se rencontraient à la tombée du jour dans un endroit éloigné. Ils exécutaient alors une sorte de danse rituelle au son de percussions et du Bobre.
Un cercle se forme. Les esclaves attendent le début de la bagarre.

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Les adversaires au centre du « rond » se toisent, se regardent dans les yeux. Sans un mot, l’un se dirige vers la droite pendant que l’autre va aussi vers la droite. Ils se déplacent autour d’un point imaginaire, situé au centre du rond. Soudain, ils s’arrêtent, les jambes écartées, se penchent vers l’avant toujours en se regardant fixement. L’un d’eux ramasse une poignée de terre puis s’en jette sur le visage, sur la tête et sur le corps. L’autre en fait de même. Retour à la terre ? Purification vaudou ? Rite ancestral ? Les instruments traditionnels résonnent. Ils s’élancent l’un vers l’autre et se percutent au niveau de leurs poitrines nues. Alors les jambes s’élèvent balayant, faisant mine de chasser l’autre, chacun à son tour. Pas de bataille sanglante mais un échange de gestes précis, étudiés.
Le Moringue se fait danse au son des musiques afro-malgaches. Le large pantalon blanc se couvre de poussière. Les deux protagonistes se confrontent noblement jusqu’à épuisement de l’un d’entre eux. Les commandeurs ne voient que du feu. Croyant assister à une danse rituelle. A la fin du combat, chacun regagne son camp en silence.

Mais le Moringue disparait au XXe siècle dans l’île. Aurait-il été contrôlé, surveillé puis interdit. Les pratiquants se cachaient peut-être. Il est remis au goût du jour par des passionnés réunionnais dans les années 1990.
Aujourd’hui, reconnu comme sport, activité culturelle et pratique artistique, le Moringue connait un engouement certain surtout auprès des jeunes. Plusieurs clubs où les adhérents ne manquent pas, se sont créés dans l’île. Cependant, le djumbé a remplacé le bobre, pour donner le rythme.

Tillum Bernard – Plasticien contemporain – St-Joseph
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Jimmy Cambona – Plasticien contemporain St-Louis Le Moringue se pratique dans plusieurs pays de l’Océan Indien, comme les Comores (Morengue), (Moringy) à Madagascar et Maurice. Mais cet art se pratique aussi au Brésil sous le nom de Capoeira. Le cousin du Bobre réunionnais s’appelle Bérimbaü au Brésil. Notons que l’Angola et le Mozambique étaient colonies portugaises et par là même, fournisseurs d’esclaves du Brésil depuis le XVIe siècle.

article issu du site ZINFOS974.COM rubrique Patrimoine, écrit par Sabine Thirel et publié avec son aimable autorisation

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