Danger : Mainmise sur les terres agricoles à Madagascar et dans les pays en voie de développement

Danger : mainmise sur les terres agricoles

Samedi 15 juin 2013, le problème de l’accaparement des terres s’est invité au coeur d’un débat organisé par Frères des Hommes à Ivry-Sur-Seine. Comment enrayer ce phénomène croissant ? A l’instar du Collectif pour la défense des terres malgaches-TANY des mouvements se mobilisent au Nord comme au Sud pour changer la situation.
Le Collectif « Tany », qui s’insurge face au phénomène croissant de transactions foncières à Madagascar, élève la voix : “A Madagascar, de 2005 à 2009, 3 millions d’hectares de terres ont été rachetés aussi bien par des poids lourds de l’agro-industrie que des gouvernements étrangers”, explique Samuel Jocelyn, vice président du Collectif Tany.

L’accaparement des terres s’est accentué : la raréfaction de la terre et de ses richesses en font un bien convoité en tant que tel. Le théâtre de l’opération : les pays en développement avec comme acteur principal des transnationales ou des gouvernements. Le scénario : l’acquisition de grandes étendues de terres agricoles dans des conditions opaques. La règle est simple, acheter ou louer massivement à prix dérisoire des parcelles de terrain exploitables pour une rentabilité maximale.

La ruée vers… la terre

A Madagascar, le cas du groupe sud-coréen Daewoo, opérant dans l’agroalimentaire, est un exemple frappant. Afin de renforcer la sécurité alimentaire de la Corée du Sud, la compagnie loue, en 2008, près d’1,3 millions d’hectares de terres malgaches pour cultiver maïs et palmiers à huile. Seul “hic” : Daewoo scelle le contrat sous forme de bail (très) longue durée – 99 ans – sans compensation financière envers les paysans qui cultivent et habitent cette terre. Non seulement l’intégralité de la récolte est destinée à la Corée du Sud, mais Daewoo emploie des travailleurs sud-africains plutôt que malgaches.

Les populations rurales, souvent majoritaires au sein des pays en développement, sont expulsées des terres qu’elles habitent et cultivent. A Madagascar, comme dans nombre de pays africains, 80% de la population est rurale et la plupart ne possède pas d’acte de propriété foncière. C’est le droit coutumier qui prévaut : la terre se transmet de génération en génération ou par alliances matrimoniales.
En 2012, les chiffres sont aussi alarmants qu’accablants, 428 millions de paysans africains [1] dépourvus de leur terre sont aux prises avec une précarité extrême. Aussi, la souveraineté alimentaire de ces pays est menacée puisque les denrées cultivées localement sont destinées à l’exportation.

Dans un monde où les terres sont de moins en moins disponibles et fertiles – érosion, désertification – et les matières premières rares (comme le pétrole), les denrées agricoles deviennent porteuses d’enjeux géopolitiques. D’autant que l’accroissement démographique se pose en obstacle à la sécurité alimentaire et énergétique des pays du Sud. La ruée vers la terre se matérialise aujourd’hui par la spéculation financière et la flambée des prix alimentaires – à l’instar de la crise de 2007-2008.

Se mobiliser

La solution pour lutter contre l’accaparement des terres ? Se mobiliser aussi bien au Nord qu’au Sud. Au Nord, le recueil et la diffusion d’informations, le soutien direct aux paysans des pays du Sud, la sensibilisation des citoyens, sont autant de procédés mis en œuvre par des organisations comme le Collectif Tany et Frères des Hommes. Dans quel but ? Celui de dénoncer efficacement et inciter le politique à rétablir justice.

Au Sud, une politique agricole nationale doit être conduite dans les pays concernés par l’accaparement des terres. Le phénomène pourra être endigué grâce à une redistribution équitable des ressources, le soutien à l’accès au crédit, mais également grâce à l’élaboration d’une législation claire encadrant les achats et locations foncières.

Ces mobilisations solidaires au Nord comme au Sud portent leurs fruits. En 2009, Daewoo est finalement contraint à suspendre son projet. Affaire à suivre…

Cet article est paru dans « Résonances », mensuel d’informations citoyennes réalisé par des jeunes militants : retrouvez ici les autres articles de ce numéro ou recevez Résonances chaque mois en vous abonnant. Pour des informations quotidiennes, venez découvrir notre page Facebook !

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