tribune libre : « SOS FANTOMES » : à propos de la BURQUA

 

 Être là, sans sembler y être, voir, sans être vu, entendre, oser, sans que personne ne le remarque, qui d’entre nous n’a pas une fois rêvé de ce pouvoir? Pourtant il semble que certains être humains jouissent d’un tel privilège bien que les motivations de ces apparitions, dans nos cités, ne soient pas celles évoquées plus haut. Au-delà du port du voile auquel nous avons consacré un article, celui de la burka nous interpelle d’avantage (l’allusion au fantôme me vient de la réflexion d’un petit garçon de 5 ans). Je n’évoquerai pas la non légitimité du symbole religieux ouvertement rejeté par la grande majorité des intellectuels religieux musulmans, l’origine de ce vêtement remontant à quelques petits siècles en Afghanistan. Il est surtout impératif, devant ce phénomène, de se s’interroger, sur le droit à vivre invisible parmi les humains et notamment sur les conséquences quant à l’épanouissement de la personne. Imaginons un monde où tous, portions la Burka, homme et femme confondu. Que seraient les relations sociales dans un monde de fantômes ? Fini le bonheur de voir un sourire s’épanouir sur le visage d’un poupon, finis les bisous affectueux entre amis, finie la caresse bienfaisante du soleil sur nos peaux frileuses et blanches. Finis aussi les bains de mer, la natation, le sport, le vélo et autres activités ludiques et récréatives. Mais me direz vous chacun est libre de se vêtir comme bon lui semble… Est-ce bien sur?

Chacun est libre de se vêtir comme bon lui semble

Imaginez une secte politique ou religieuse demandant à ses adhérents de porter en signe de repentance, un boulet au pied, un anneau au nez, ou pire de se mutiler les oreilles, les mains etc…Il y a en effet certaines prescriptions qui vont à l’encontre de la dignité humaine et c’est cet aspect qui peut rendre le port du voile intégral inacceptable. Nous devons être heureux, les uns les autres, de vivre dans un pays qui nous impose l’auto-respect. Il y a des contrées où l’usage des scarifications religieuses est courant et accepté, mais il faut consentir à ce que les notions d’asservissement à des rites religieux ne soient pas les mêmes sous toutes les latitudes. Pourtant, il y a chez nous une catégorie de personnes qui vivent une asociabilisation religieuse imposée mais acceptée volontairement par ses adeptes. Je veux parler des moines, trappistes et des religieuses cloîtrées qui, depuis des centaines d’années, vivent loin des regards et de l’agitation de ce monde. Je ne fais pas d’amalgame, mais je pose la question : un être humain peut-il refuser au nom d’une vocation, tout contact avec ses semblables, le reniement de sa famille (car ça existe) et l’enfermement en cellule? Prisonnier volontaire, en quelque sorte. J’ai visité un jour un cloître dans lequel j’ai eu un entretien avec une jeune dame, je le devinais à sa voix, cachée derrière un grillage. Celle-ci parlait de son bonheur de prier pour le monde et de méditer sur les mystères de la foi….Cela me reporte à l’interview entendu récemment d’une jeune musulmane « cloîtrée » derrière sa Bourka, clamant son engagement à sa foi. Et si la Burka n’était autre qu’un cloitre ambulant? Un peu génant non, cette réflexion? Moi, je l’avoue, elle me gène, comme me gêna la jeune sœur Clarisse qu’un rideau de fer séparait du monde. Ah,vous ne pensiez pas à ça, n’est ce pas? Pourquoi oublie t-on, parmi les loquaces militants de la condition humaine, tous ces hommes et ces femmes de Dieu que l’on ne voit pas non plus, reclus consentants? Parce, justement, on ne les voit pas. Bien sur, suis-je bête, loin des yeux….loin du cœur…Pas vu, pas pris…silence Faudrait-il donc convoquer le parlement et statuer sur cette pratique religieuse millénaire qui nous légua de si beaux édifices? Peut-on voter l’interdiction des cloîtres baladeurs et ignorer les sédentaires? Quel argument invoquer pour soutenir légalement cette discrimination? Parce que les uns sont bien de chez nous, de notre tradition et qu’il fut plus tolérable d’accueillir à l’assemblée des députés en soutane (l’abbé Pierre, le chanoine Kir qui nous légua une délicieuse boisson)? Peut être les temps changent-ils et notre évolution, j’allais dire « révolution », laïque actuelle se durci et le bon abbé Pierre n’aurait plus la côte de nos jours dans l’hémicycle…et je n’évoquerai pas les fonctions ministérielles de cardinaux aprés de nos bons rois de France…Nous nous réjouissons de cette évolution des mœurs qui nous vit accueillir l’avortement, la libération de la femme, le divorce mais aussi abolir les châtiments corporels, la torture, la peine de mort et autres « traditions » ancestrales. Pourquoi ne pas dès lors, refuser l’affichage vestimentaire et ostentatoire d’une appartenance à une caste, un clocher, une tribu ? Le clergé catholique a parfaitement compris que l’habit ne fait plus le moine; reste à convaincre peut être, ceux qui le pensent encore. Seuls les prêtres et les religieuses intégristes portent l’habit traditionnel de leur état, ils ne font là que s’affilier aux intégrismes des autres religions (chapeau, cordon blanc et tresses pour les juifs Hassidims, djellaba, chèche, voile et burka pour les musulmans). Je ne prends parti, ni pour uns ni pour les autres, je ne conteste à personne le doit, reconnu par l’état, à la pratique religieuse de qui que ce soit et sous la forme qu’il souhaite, mais je constate que l’élargissement du débat reste trop limité à l’environnement musulman et cela me gène un peu. A moins que l’on ne rejette cette pratique extrémiste de l’islam comme étant une aliénation de la personne, voir même une violation inacceptable des droits de l’homme… Dans ce cas ne pourrait-on pas légitimement l’envisager aussi à propos des cloîtrés catholiques, qui, de nos jours le sont, les mœurs évoluant, de moins en moins? Comme fréquemment, je n’apporte pas de solution au débat, peut être, juste l’élargir est mon souhait afin de ne stigmatiser personne. Mais voyez vous et personne ne me l’a jamais reproché ouvertement, cela fait partie d’une pratique ostentatoire de ma religion….

reflexions humanistes et spirituelles | claude.serries@club-internet.fr

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