Jaya, l’histoire d’une jeune engagée indienne débarquée à La Réunion au XIXe siècle.

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Après “Quartier Western” et “L’Afrique de Papa”, l’éditeur dionysien des « Bulles dans l’Océan » revient avec deux nouvelles pépites de la BD de l’océan Indien. “Jaya”, sur scénario de Sabine Thirel et dessin de Darshan Fernando, raconte l’histoire d’une jeune engagée indienne débarquée à La Réunion au XIXe siècle. “Mégacomplots” à Tananarive, signé des Malgaches Pov et Dwa, narre les manœuvres sournoises d’un jeune homme qui veut prendre le pouvoir dans son université. Deux livres à paraître en avant-première lors du tout prochain festival Cyclone BD de Saint-Denis.

Après les très réussis “Quartier Western” de Téhem et “L’Afrique de Papa” d’Hippolyte, on attendait avec impatience les nouvelles productions du jeune éditeur Des Bulles dans l’Océan, dont la ligne résolument ambitieuse consistant à mettre en avant des thématiques africaines et indo-océaniennes à travers des ouvrages d’une grande qualité de maquette et d’impression méritait assurément un prolongement.

C’est désormais chose faite, avec la sortie grand public prévue dans les bacs en janvier prochain, après un premier lancement lors du festival Cyclone BD de Saint-Denis dans quelques semaines, de deux nouveaux ouvrages très prometteurs. Des one-shots de 72 et 94 planches sur le même format que “Quartier Western”, au dos toilé et frappé à la main, que tout bon bédéphile réunionnais se devra d’avoir dans sa collection. À commencer par “Jaya”, l’histoire d’une jeune engagée indienne embarquée pour La Réunion en 1865, comme des milliers de ses compatriotes venus fonder les premières communautés tamoules de l’île. Un livre en forme de rencontre entre la romancière réunionnaise férue d’histoire Sabine Thirel (“Cadet de famille”, “Noir Café”), déjà venue à la BD avec les aventures du pirate “Long Ben” (chez Orphie), et le jeune dessinateur franco-indien Darshan Fernando, dont c’est le premier album. La première livre un récit à la fois dense et aéré, aux bases historiques très solides, sans pour autant tomber dans le tout-pédagogique et occulter la force dramatique de cette aventure, qui va mener la jeune héroïne des côtes de l’Inde aux champs de cannes réunionnais, en passant par le Lazaret de la Grande Chaloupe (dont on vient de marquer le 150e anniversaire) et la découverte des esclaves marrons dans les hauts de l’île. Le second, élève de l’école Émile Cohl de Lyon, surprend par la maturité de son dessin et de son découpage pour sa toute première BD. Avec un trait à la plume rappelant le travail d’un Blain, habilement mêlé à de la ligne claire, ce Darshan Fernando, 27 ans à peine, s’annonce sans aucun doute comme une grande révélation sur le marché français de la BD.
La BD, vecteur d’identité

Le responsable éditorial, Jean-Luc Schneider, ne cache pas à sa joie de voir ce livre réalisé en un temps record, pour un tel résultat qualitatif. Un livre “qui rentre pleinement dans notre ambition de conforter l’idée de l’identité réunionnaise, en montrant à ce jeune peuple que sont les Réunionnais la richesse et la diversité de leur histoire, sans tomber dans un côté trop pédagogique. Pour cela, la BD est un vecteur idéal”, estime l’éditeur.

Faire connaître La Réunion, mais aussi les îles voisines. C’est dans cette démarche que s’inscrit la sortie, à la même période, de “Mégacomplots à Tananarive”, un ouvrage imposant signé à quatre mains des Malgaches Pov et Dwa. Le premier, très connu à Maurice où il signe les dessins de presse de “L’Express”, après s’être occupé pendant des années de ceux de “Midi Madagascar”, a rencontré le second, disciple de Rabaté, Huo-Chao-Si et Mako non pas sur leur terre de naissance mais à La Réunion, à l’occasion d’un précédent festival Cyclone BD. Pour leur première collaboration, ils signent un album mêlant espérances de jeunesse et magouilles politiques. L’histoire est celle d’un jeune étudiant malgache qui, pour s’évader de sa vie et rejoindre son frère en Europe, se lance en campagne pour obtenir le très convoité poste de président de l’association des étudiants de l’université de Tana. Il va devoir, pour ce faire, séduire l’électorat en employant des méthodes pas toujours avouables. “Une histoire universelle, qui aurait pu se dérouler ailleurs qu’à Tana, mais qui prend toute sa saveur au regard de la situation politique à Madagascar”, commente Jean-Luc Schneider, saluant “un album bien rythmé, avec de multiples rebondissements et une chute très intéressante.” 500 exemplaires de chaque album devraient être disponibles en avant-première lors du festival Cyclone BD, du 1er au 4 décembre prochain, et sur lequel nous aurons l’occasion de revenir très prochainement dans nos colonnes.

De quoi valoriser en tout cas la production BD réunionnaise, avec deux albums de très bonne facture qui montrent que le talent n’a pas déserté notre région.

Sébastien Gignoux (JIR du 20/11)

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