les esclaves oubliés de Tromelin

Les travaux de restauration des objets archéologiques découverts sur l’île de Tromelin ont débuté à Saint-Pierre. Jusqu’au 6 août, le public pourra découvrir tout un panel d’ustensiles et de récipients qui ont permis aux esclaves abandonnés de survivre sur cet îlot hostile pendant quinze ans.

Quatre ans après leur première découverte, les objets archéologiques découverts sur l’île de Tromelin sortent du fénoir. Jusqu’alors stockés dans un local sec et climatisé de la préfecture des Taaf, ils passent désormais entre les mains des experts du centre archéologique du Var, qui devraient effectuer l’essentiel des travaux de restauration en deux mois. “L’enjeu consiste à révéler les traces de fabrication et d’usage”, expose Jacques Rebière, directeur de laboratoire. Car malgré leur apparence relativement bonne, les objets métalliques ont développé une corrosion, qui ont fait disparaître de précieuses informations à leur sujet. En plomb, en cuivre ou en métal, ils vont être nettoyés en priorité par ce “médecin pour objets malades” et sa collaboratrice. “Nous utilisons des moyens mécaniques, comme des scalpels, et aussi des outils à air comprimé, explique le directeur. Une partie de notre travail se fera par le biais d’un traitement chimique, pour dissoudre les corrosions dans la soude. ” Cuillers, récipients, pics, anneaux métalliques… tous ces objets récupérés ou fabriqués par les esclaves de Tromelin ont contribué à leur survie au long de ces quinze années d’oubli sur cet îlot hostile. C’est pourquoi les scientifiques les considèrent comme autant de trésors. “La notion de trésor est à géométrie variable, avance Jacques Rebière. Je considère ces morceaux de charbon de bois et ces silex comme des trésors, puisqu’ils témoignent que ces hommes et ces femmes ont été capables de reproduire du feu pendant quinze ans.” Pour le préfet des Terres australes et antarctiques françaises, la restauration de ce millier de pièces revêt “une importance considérable pour la communauté internationale”. “Nous avons une responsabilité morale vis à vis de ces objets et de ceux à qui ils ont appartenu, et donc l’obligation de les restaurer, puisqu’ils appartiennent au patrimoine de l’océan Indien”, estime Rollon Mouchel-Blaisot. D’où l’idée d’en exposer une partie au public jusqu’au 6 août à Saint-Pierre, dans le bâtiment des “Comptoirs du Sud”, aménagé en salle d’exposition et en laboratoire pour l’équipe de restauration. La préfecture des Taaf a également proposé à la mairie saint-pierroise de réaliser une exposition davantage fournie pour présenter les principaux objets une fois restaurés afin de transmettre l’histoire des esclaves oubliés de Tromelin. Parallèlement, le préfet milite pour la création d’un centre à rayonnement régional chargé de la restauration et de la conservation de ces “trésors”. “Les fouilles ne seront pas éternelles, mais les travaux sur les trésors sont loin d’être terminés”, a poursuivi Rollon Mouchel-Blaisot. En novembre prochain, une troisième campagne de fouilles archéologiques aura lieu à Tromelin. Elle sera menée par une équipe scientifique franco-mauricienne, signe de l’engouement régional pour les esclaves oubliés de Tromelin

Julien Cinier

- Les objets sont exposés jusqu’au 6 août sur le front de mer de Saint-Pierre, dans le bâtiment des “Comptoirs du Sud” (à côté de la capitainerie). Horaires : 9h-12h et 14h-16h.

- Quinze années de survie dans l’oubli

Les commentaires sont fermés.

Catégories
Archives