Partager le travail et améliorer son bien-être

 

                             
A l’heure où une mondialisation effrénée a entraîné une crise sans précédent, des dégraissages en nombre  et  un chômage massif  : 10,1% de taux de chômage le plus élevé d’Europe hormis l’Espagne, (dont nous ne parvenons pas à sortir), il m’a semblé intéressant que tout un chacun se pose la question d’une autre façon de vivre.

 Récemment un groupe de réflexion britannique a préconisé de travailler moins pour améliorer notre bien-être et consommer différemment.

 Travailler moins permettrait non seulement d’améliorer notre bien-être -ce qui devrait être le fruit d’une croissance bien comprise-  mais aussi de partager le travail avec des exclus de plus en plus nombreux. Aux USA, la « New Economics Foundation » préconise une semaine de 21 heures pour faire face aux enjeux du XXIe siècle : quels sont-ils ?

 D’abord la nécessité de réduire drastiquement nos émissions de CO2 en achetant moins de produits gourmands en énergie et en revoyant l’idée que nous nous faisons de nos besoins.

Apprendre à consommer moins, à ne pas être esclaves de la pub, et à se contenter de l’essentiel. (venir avec une liste au supermarché par ex)

 
Ensuite un rééquilibrage du travail : alors que certains en sont surchargés, que les « vieux » épuisés travaillent à la place de jeunes réduits au chômage ou à la délinquance,.En outre, certains travaillent et consomment inconsidérément alors que d’autres ont à peine de quoi vivre… Peux t’on adhérer moralement à une telle société ?

 
Les femmes ayant des enfants en bas âge et les salariés disposant de revenus élevés en particulier ont bien accueilli la semaine de 35 heures. Pour les autres, ce sera l’apprentissage de vivre mieux et différemment.

 
La N.E.F citée plus haut préconise le remplacement progressif sur 10 ans d’augmentations de salaires par une réduction des horaires de travail. On aurait ainsi le temps de décourager les heures supplémentaires, de réduire les charges, d’instaurer un salaire minimum plus élevé et de faire évoluer les attentes des gens.

 Pour surmonter la crise, l’Etat devra non seulement partager le travail mais aussi redistribuer les richesses. En effet le sous-emploi et les inégalités sont liés.

 Dans un état de droit, le droit au travail est un droit sacré inscrit dans la constitution. Déjà nous constatons que les entreprises en difficulté en sont réduites à modifier les règles du chômage technique pour éviter les pertes d’emplois. C’est ce qui se passe en Allemagne ou de facto la semaine de travail hebdomadaire moyenne tombe à 30h. Aux USA, on a déjà constaté à travers des études multiples que les restructurations n’améliorent ni la productivité, ni la rentabilité ni même le cours en bourse des sociétés. En outre, on constate que ce n’est pas pour assurer leur survie que la plupart des entreprises licencient mais pour maintenir les bénéfices des actionnaires.;

 Flexibilité tel est le mot à la mode chez les patrons… Or, on constate qu’après une restructuration, le chiffre d’affaires par salarié recule… C’est que les licenciements coûtent très cher : indemnités de départ, frais de reclassement, augmentation des cotisations chômage, frais d’embauche quand l’activité reprend, démoralisation et refus de prise de risque pour les salariés restants, risques de procès, de sabotages voire de violences sur le lieu de travail des salariés mécontents en poste ou renvoyés, perte de confiance dans l’encadrement, baisse de la productivité, départ des meilleurs employés lors de l’annonce de « dégraissages »…

 

Pourquoi y a t’il si peu d’emplois ? Certes la mondialisation encourage les entreprises à partir là où les salariés coûtent  nettement moins chers, le progrès technique et notamment l’informatisation généralisée -au lieu d’améliorer les conditions de vie de chacun par une réduction des horaires de travail- a été utilisé par les patrons pour remplacer l’homme par les machines (au moins celles-ci ne font pas grève…). On pourrait rajouter les concentrations et fusions d’entreprises. Or, non seulement les grandes entreprises innovent moins que les petites mais elles empêchent les P.M.E de se développer- alors que celles-ci sont les plus créatrices d’emplois- Les économistes ont depuis longtemps remarqué que ce qu’adorent les hommes d’affaires, c’est l’absence de concurrence. Or une véritable économie de marché repose fondamentalement sur la concurrence. Il faudrait en fait empêcher quelques mastodontes de s’emparer de l’économie…

 Le chômage se développe inexorablement ? Fermons nos barrières européennes en taxant les produits du reste du monde quand ils sont susceptibles de concurrencer les productions de l’Europe. Cela évitera bon nombre de fermetures ou de délocalisations d’entreprises. Parallèlement, acceptons l’entrée de tous les produits qui ne peuvent être fabriqués en Europe.

 On sait pourtant comment faire baisser le chômage : le grand économiste Keynes disait déjà qu’il suffisait de dépenser de l’argent pour éliminer le chômage de masse. Les gens travaillent pour de l’argent. Si le gouvernement en donne les gens travailleront…

 Le partage du travail reste la meilleure solution : Au lieu de payer les gens à ne rien faire, permettons leur de garder leur poste en travaillant moins. Si l’on veut éviter le licenciement d’un salarié, demandons à ses collègues de faire moins d’heures moyennant une petite réduction de salaire. C’est le système utilisé avec succès en Allemagne et aux Pays Bas alors que ces pays ont subi une récession plus forte qu’en France et même qu’aux Etats Unis. Dans ce système de chômage partiel, l’entreprise réduit de 20% les heures de son personnel. Le gouvernement verse à chacun 60% du salaire perdu et l’employeur 20%; L’employé ne perd ainsi que 4% du salaire initial. (il travaille par exemple 4 jours au lieu de 5 en ne perdant presque rien au plan salaire, faisant aussi des économies d’essence et de garde d’enfants)

Travailler un jour en moins réduirait aussi considérablement les émissions de gaz à effets de serre produits par les automobiles…

 

Patrice LOUAISEL
Psychologue du Travail

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