Archive pour la catégorie ‘XVIIIe et XIXe siècle’

L’immigration chinoise à la Réunion au XIXe siècle

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L’immigration chinoise à la Réunion au XIXe siècle

Si l’on retrouve la trace de quelques femmes chinoises au milieu du XVIIIe siècle, il faudra attendre 1843, juste avant l’abolition de l’esclavage de 1848, pour que le gouverneur de l’ile Bourbon signe un arrêté permettant « l’introduction de 1000 laboureurs chinois. »

C’est ainsi qu’arrivèrent en 1844 de Malaisie et de Pulo Pinang, les premiers travailleurs chinois. Le 1er engagé chinois arriva donc sur le bateau « l’Auguste et Marie » le 28/01/1844 en provenance de Singapour.

Peu de temps après, le « Suffren » débarqua 54 chinois en provenance de Pulo Pinang. Ce fut ensuite le tour du « Sarcelle » le 7/07avec 69 engagés, du « Palladin », le 16/08 avec 216 engagés, et du « Nouveau tropique » le 5/10 avec 178 engagés.

On peut penser que comme avec les autres candidats à l’immigration, on ait quelque peu abusé de ces pauvres gens en leur promettant monts et merveilles à leur arrivée ici, de gagner des fortunes et de travailler
dans le domaine de leur choix …car très vite cette immigration posa problème.

Alors que les premiers engagés sont qualifiés de zélés au travail, faisant preuve de bonne conduite et de sérieux-ce qui est tout à fait dans la dynamique du « confucianisme », il apparait que dès 1846 on suspend l’immigration… En effet, les colons font état alors de multiples incidents, de personnes peu assidues au travail, lui préférant le jeu, faisant preuve d’insubordination et quelque peu revendicateurs.

En fait s’ils ont bien signés le livret d’engagement mentionnant l’activité pour laquelle ils ont été recrutés-à savoir laboureurs-, il semble que beaucoup d’entre eux étaient analphabètes et ne savaient donc pas lire… D’où l’impression d’avoir été abusés en arrivant à la Réunion.

De plus, les colons ayant pris la mauvaise habitude de faire travailler
leurs esclaves au delà des heures légales, faisaient de même avec leurs engagés ce que ceux-ci n’appréciaient guère allant s’en plaindre aux autorités …C’était pour les colons un « crime de lèse-majesté ».

Malgré tout, la première boutique chinoise, ouverte à la Possession, a lieu en 1858 par Chen Zhang

En 1862, comme on a besoin d’énormément de main d’oeuvre, l’immigration redevient libre et on voit apparaitre en 1864, la première femme chinoise.

L’alimentation des engagés est quantifiée : la ration quotidienne est de 3 litres d’eau/jour, d’un kilo de riz, de 125 g de poisson séché et de 15g de sel. Le colon doit en outre fournir un hamac de 2m de long et de 50cm de large à chacun de ses engagés.

Alors que l’immigration chinoise s’était plutôt fait sur le nord de l’ile avec majoritairement des cantonnais, le premier « hakka » en provenance de Meixian et engagé sur St Pierre est signalé en 1885.
C’est aussi vers cetté époque qu’a lieu l’enterrement de Hong Hing,
avec la plus vieille tombe chinoise recensée.

En 1896 a lieu le transfert du temple Chane de la rue du Grand Chemin (actuelle rue maréchale Leclerc) au bas de la rue Ste Anne.

En 1901, 812 engagés arrivent en provenance de Fuzhou.

Et à nouveau des révoltes signalées en 1902 avec de nombreux retours en Chine en 1906 …

La fin d’une belle « Année Elie » avec l’historien Sudel Fuma

Communiqué du K.L.É. (Kolèktif Lané Éli) – 30 décembre 2011.
Le Kolèktif Lané Éli, lancé le 15 décembre 2010 par la Chaire UNESCO de La Réunion avec plusieurs personnalités et associations culturelles, s’est réuni ce 29 décembre 2011 à Saint-Denis. Cette rencontre s’est tenue à deux jours de la clôture de cette année, consacrée par de nombreux Réunionnais à la commémoration du 200ème anniversaire d’un événement très important de leur Histoire : la révolte de nos ancêtres esclaves dans la région de Saint-Leu, conduite par l’esclave forgeron créole Élie et ses ami(e)s.

La fin d’une belle « Année d’Élie »,

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… avec un combat pour la liberté à continuer

Les responsables d’associations présents à cette réunion ont fait un bilan de la célébration de ce bicentenaire, marquée par des dizaines d’actions publiques organisées dans toute l’île durant toute l’année. Ils tiennent à souligner le grand intérêt de la population pour la connaissance de cette révolte et l’hommage chaleureux qu’elle a rendu à ces Réunionnais combattants de la liberté.

Le K.L.É. tient donc à remercier toutes les personnes physiques et morales qui ont contribué à la mobilisation des citoyennes et citoyens de notre île pour la réussite de cette belle « Année d’Élie ». Cette mobilisation prouve à quel point l’unité des Réunionnais dans le respect de leur diversité ainsi que leur détermination à résister à l’ignorance et à l’effacement de leur Histoire peuvent contribuer à transformer notre société.

Cette réussite prouve également combien progresse la prise de conscience du peuple réunionnais et l’importance de la connaissance de son Histoire afin de mesurer l’héritage que nous devons à nos ancêtres. Nous devons tirer les leçons du passé pour en réparer les séquelles négatives et pour construire un avenir responsable et harmonieux.

C’est pourquoi le K.L.É., qui est dissout ce 31 décembre, se prépare d’ores et déjà avec tous ses ami(e)s à continuer son action, en participant notamment à la mise en œuvre du collectif Somin La Mémwar, dont le prochain regroupement est prévu le dimanche 22 janvier 2012 à la Grande Chaloupe. En effet, plus que jamais, comme nous l’avions déclaré à l’occasion de la dernière fête nationale réunionnaise du 20 Désanm, nous devons unir les forces vives de notre peuple pour l’aider à s’appuyer sur toutes les formes de résistance de ses ancêtres afin de se libérer des oppressions et injustices dont il est victime aujourd’hui.

Allons donc tous ensemble perpétuer la belle célébration de « l’Année d’Élie » sur le chemin de la libération de ce pays, l’affirmation de la pensée réunionnaise et la reconnaissance de son identité.

Sudel Fuma,

directeur de la Chaire UNESCO de La Réunion,

coordonnateur du K.L.É. (Kolèktif Lané Éli).

un cimetière d’esclaves mis à jour près du cimetière marin

Les fouilles entamées la semaine dernière derrière le cimetière marin de Saint-Paul comblent les archéologues au-delà de leurs espérances. Les scientifiques viennent de confirmer l’existence d’un ancien cimetière de 2000m2, probablement réservé aux esclaves. Une douzaine de squelettes ont déjà été exhumés.

Il n’aura fallu qu’une petite semaine de fouilles aux scientifiques pour confirmer leurs premières hypothèses : une ancienne enceinte funéraire jouxte l’actuel cimetière marin de Saint-Paul. L’équipe composée de trois archéologues et d’étudiants de l’université est parvenue à déterminer une zone d’environ 2000m2, située entre la clôture du cimetière et la mer dont le sous-sol regorge de squelettes. Sept forages ont été effectués ces derniers jours et cinq d’entre-eux se sont révélés positifs. Dans chacun, des corps parfaitement disposés, tous orientés vers l’ouest sud-ouest qui prouvent une organisation du lieu et non une accumulation aléatoire de corps comme les vagues de Gamède avaient pu le laisser penser en 2007. C’était la principale interrogation des chercheurs. Le mystère est donc levé. Mais l’équipe scientifique ne s’est pas contentée de déterminer le périmètre du lieu et sa raison d’être. L’un des forages a été en effet exploré en profondeur et une douzaine de squelettes y ont été mis au jour. Certains entiers, d’autres amputés ou simplement résumés à la présence de quelques structures. La fouille approfondie de cet espace d’environ 20m2 a notamment permis d’identifier plusieurs phases d’inhumations successives, jusqu’à six par endroits, six squelettes enterrés dans un espace de 2 à 3 m2. L’un d’eux était d’ailleurs un nouveau né.

Des dents taillées : un rituel africain

Mais ce qui s’impose peut-être comme l’autre découverte majeure des chercheurs date d’hier matin précisément. Nettoyé patiemment au pinceau, l’un des crânes a révélé la présence de plusieurs dents taillées, canines et incisives. Un rite très couramment pratiqué sur tout le continent africain, du moins dans sa partie subsaharienne “ et que l’on retrouve dans la plupart des terres d’esclavage”, note Bruno Bizot, l’archéologue détaché pour cette mission par la Drac de Marseille. Inutile de préciser que le squelette en question est donc très probablement celui d’un ou d’une esclave. Mais cela suffit-il pour autant à affirmer que cette enceinte était à coup sûr un cimetière d’esclaves uniquement ? Les scientifiques sont divisés sur le sujet. Pour l’historien Sudel Fuma, la réponse est “ oui à 99,9% et même à 100%”. L’universitaire a travaillé sur ce thème des sépultures séparées dans l’océan indien. Les premiers résultats des fouilles l’attestent selon lui. D’abord l’absence de pierres, de blocs rocheux et de métal qui suggère des enterrements sans faste, sans tombeau, dans des cercueils simples. Puis l’ancienneté des squelettes retrouvés, probablement inhumés aux XVIIIe et X1Xe siècles. “Jusqu’en 1820, la séparation des sépultures entre esclaves et colons était très nette” explique-t-il.

Étudier les restes d’ADN

Enfin la présence de dents taillées qui prouvent l’origine africaine des squelettes. Éric Kichenapanaïdou, archéologue au service patrimoine de la ville de Saint-Paul appuie son propos. “Jusque-là, nous n’avions jamais eu la preuve de cette séparation. C’est une première pour la Réunion mais aussi pour l’ensemble du monde colonial français. Nous ne sommes plus dans l’étude des récits historiques, nous touchons physiquement les matériaux de l’esclavage, nous sommes devant nos ancêtres, c’est très fort “. Bruno Bizot pour sa part refuse de s’avancer jusque-là, faute d’avoir pu fouiller de l’autre côté du mur pour comparer par exemple les conditions d’inhumation dans le cimetière officiel, celui potentiellement des colons. Pour lui, il revient aux historiens de travailler désormais pour conforter cette hypothèse. L’archéologue insiste également sur la nécessité de poursuivre les recherches sur les squelettes exhumés. Sous réserve de trouver une solution de conservation (problème non élucidé pour le moment, voir par ailleurs), le scientifique estime nécessaire de développer par exemple des analyses génétiques en prélevant s’il en reste de l’ADN fossile dans la pulpe dentaire de squelettes. Étude qui pourrait confirmer l’origine géographique ou ethnique de ces individus. Des études dites paléopathologiques permettraient également d’identifier les traumatismes musculaires et osseux causés par les activités de ces hommes et femmes de leur vivant. Une autre façon de confirmer leur condition servile. Il reviendra à l’Etat et à la ville de Saint-Paul, copropriétaires des vestiges, d’autoriser ou non ces recherches. Autorisation qui sera sans nul doute rapidement délivrée. En attendant, cette première véritable fouille archéologique impulsée par la DAC-OI à la Réunion suscite déjà une grande émotion. “C’est un moment exceptionnel que nous vivons”, estime notamment Sudel Fuma. “Les Réunionnais viennent de sortir du néant une part d’eux-mêmes, affirme pour sa part la députée-maire de Saint-Paul Huguette Bello. Cette découverte ouvre incontestablement une nouvelle page dans la connaissance de notre histoire”

*Tous les squelettes retrouvés entiers ont été inhumés en direction de l’ouest, selon le rituel chrétien

Romain Latournerie
sources Journal de l’Ile clicanoo.re

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